mercredi 19 septembre 2012

It's yummy- LA!


Quand Yau, la femme de ménage du bureau, apporte des petits snacks typiquement chinois: il faut les manger. Finalement c’est comme quand on est invité dîner chez quelqu’un et qu’on n’aime pas ce qu’on nous sert à table, on mange et avec un sourire. Sauf que là j’ai droit au regard curieux de tout un groupe de gens rivé sur moi : « It’s a vely good chinese snack-là ! Do you like it ? » ou bien « Yummy-la ? ».




Ces œufs sont en effets des œufs durs qui ont cuit plus longtemps que nos œufs durs habituels dans une eau à base d’épices chinoises et de thé. Le résultat est visuellement étrange, voire dégueulasse, le goût tout aussi étrange, mais mangeable. Ils voulaient me filer un deuxième mais j’ai contrôlé ma gourmandise : 2 œufs noirs à 11h du matin c’est peut-être un peu trop… !

Par ailleurs, l’autre jour, lors de l’anniversaire de Sue (une des filles de l’équipe), nous sommes tous allés déjeuner ensemble. Après le déjeuner, Peken avait apporté une espèce de boisson locale chinoise, selon eux très bonne, avec laquelle nous avons trinqué. C’était une sorte de thé plus gluant et plus épais que le thé normal, de couleur brune très foncée. Il m’a servi la boisson dans mon petit thermos Starbucks que je garde au bureau pour mon thé. J’ai bu les gorgées protocolaires pour valider le trinquage mais je n’ai pas pu le finir…. Mais pour ne pas vexer Peken en allant avec mon thermos aux toilettes pour le vider et le laver au plus vite, et prise par des milliers d’autres sujets, le thé a macéré quelques nuits dans le thermos. Autant dire que le thermos est inutilisable, une odeur horrible s’y est imprégnée…

Stephen, un des designers de l’équipe, est rentré de ses vacances de Taiwan et nous a ramené des « snacks » taiwanais : en gros des poissons séchés sous vide avec une odeur absolument nauséabonde. Ces poissons me font penser à la nourriture que je donnais à ma tortue.  Je n’ai pas pu honorer Stephen… Mais ces jours là ils savaient que je n’allais pas très bien de l’estomac (on fini par devoir partager ce genre d’info puisqu’ils proposent de la bouffe continuellement). Il faut d’ailleurs préciser qu’ils me demandent tous mes symptômes corporels en détail et sans aucune pudeur : « what do you feel exactly ? Do you have too much gaz in the stomach ? ». C’est qu’en réalité, leurs rapports aux « gaz » est totalement décompléxé.

En effet, au bureau c’est le festival des rots. Yau, la femme de ménage, passe toute la journée au bureau, et fait le ménage 2 fois par jour (c’est l’endroit le plus récuré de la terre). Elle a même un ordi assigné pour elle, dans lequel elle n’a qu’accès à l’intranet de la boîte mais elle y passe des heures devant l’intranet en train de roter haut et fort et d’émettre des bruits avec sa gorge/bouche immondes. Mais cela est vécu avec naturel par tout le monde et parfois même elle obtient des réponses d’autres rots dans la salle. Comme un jeu de chants d’oiseaux qui se répondent mutuellement et amoureusement d’un arbre à un autre, sauf que là le son et le scénario sont moins bucoliques. Et surtout je suis au milieu en silence, en retenant mon souffle pour esquiver toute effluve eventuelle….

Je déjeune souvent avec mes collègues et je me laisse toujours guider par eux. Je ne veux pas les contraindre dans leurs habitudes, puis les déjeuners dans les restos chinois sont à des prix beaucoup plus raisonnables que les restos occidentaux. Et finalement, je suis en Chine donc autant commencer à m’y habituer...
 Ce fut ainsi que je vécu une expérience mémorable. Stephen (de mon équipe) et Brize (un de mes collègues de l’équipe des merchandisers. C’est l’équipe qui s’occupe de la production des accessoires) m’ont amené dans un endroit unique dans son genre. Au 10ème étage d’une tour anonyme (comme la plupart des tours à HK) à côté du bureau, avec une clim à 13-15 degrés nous sommes arrivés dans un restaurant de très grande surface avec un décor unique dans son genre :

      des fenêtres en formes arabesques

- 
-      des lampes qui pendaient dans un style plutôt pseudo-indien ?
    des statuts par dizaines de femmes pirates (un peu putes sur les bords) avec des décolletés vertigineux






-       une statut de Barack Obama à l’entrée, assis sur un banc, comme une sorte d’invitation amicale à s’asseoir à côté de lui (ce que j’ai fait bien sûr...). Barrack quel plaisir de te rencontrer à HK! 




-       de la nourriture chinoise-singapourienne-malaisienne, bref, un peu de tout... ce qui est suspect... 


Autant dire que ça été un des restaurants les plus étranges que j’ai jamais fait de ma vie. Le menu était tout en chinois, j’ai donc laissé mes collègues choisir pour moi : ils me parlait de satay, cela m’est familier, j’ai donc dit oui. Quand le serveur s’est présenté, mes collègues m’ont dit qu’il fallait que je choisisse entre des légumes ou de la glace :

-       Sorry ?
-       Do you want vegetables or ice cream ?
-       But I have to choose between vegeables and ice cream ?
-       Yes
-       OK. It’s a curious choice… What is the flavour of the ice cream ?
-       Red beans
-       OK, I take the vegetables

Le plus grand choix de ma vie : ou bien des légumes ou bien de la glace. Deux choses évidemment substituables entre elles.



La liste des boissons était en anglais. On pouvait y lire : hot coke with lemon, hot sprite with lemon, etc.



 Je les intérroge au sujet du coca chaud, ils me disent que c’est excellent quand on se sent faible ou un peu malade. Je leur dis que je veux simplement de l’eau plate. Ils me disent que l’eau est gratuite et qu’il faut que je choisisse une autre boisson. Je demande donc le coca mais normal (pas réchauffé).
Au bout de 15 minutes, les boissons ne sont toujours pas servies. Je demande à Stephen si on a bien commandé les boissons (puisque tout se passe en chinois donc tout m’échappe). Il me répond que oui. Arrive donc le plat principal : un grand bol, avec une viande de porc qui sentait fort l’animal qui flottait dans une eau marron couleur caca (la fameuse sauce satay) et des nouilles. Je mange les nouilles et je bois la sauce, je laisse la viande.
Une fois ce festin de satay-caca fini, ayant déjà mangé aussi mes légumes (avec le plat principal), mes collègues ayant également mangé leurs glaces (avec le plat principal aussi, bien sûr), je croyais qu’on demanderait l’addition… Mais non, à ce moment là… les 3 énormes verres de coca arrivent ! Ils n’avaient pas oublié le coca ! C’est juste qu’il vient à la fin… ! On se met donc à boire le coca tranquillement et en silence. Il faut dire qu’il y a beaucoup de silences et de moments où ils ne parlent qu’en chinois entre eux en ma présence, sans aucun souci que je puisse être perdue. C’est assez hallucinant. Au début c’est un peu étrange mais maintenant je m’en fout. Tout cela est accompagné d’attitudes incongrues : pendant qu’on boit le coca en silence, un des types avec qui je déjeunais se lève brusquement et il part sans dire un seul mot, sans exprimer un seul geste. Dans ma tête il était peut-être allé aux toilettes et il reviendrait. Mais non… il était simplement rentré au bureau :

-       Where is Brize ?
-       He’s gone
-       Really ? Without saying anything ?
-       Yes (avec tête de "c'est normal meuf, pourquoi tu t'étonnes?...)
-       OK.

  Pour demander l'addition il suffit d'appuyer sur le bouton "check-out" et 2 min après un petit chinois s'empresse de nous encaisser. Non sans oublier le petit cadeau : une sauce piquante pour agrémenter mes repas à la maison. 


Que demander de plus? C'est le luxe ici! La vie repose sur un mot: "convenient" (ce qui à l'anglaise signifie pratique), tout doit être "convenient", sinon ça ne sert à rien...!
Pourquoi devoir appeler le serveur pour l'addition, alors qu'on peut appuyer sur un simple bouton?
Pourquoi devoir se justifier si on doit partir de table? 
Pourquoi devoir inhiber un rot alors que notre corps ne demander qu'à expulser tous ses gazs?

C'est le pragmatisme à l'état pur, une forme de sagesse...